René, Anselme et Eugène se tiennent en rangs serrés sur le champ de bataille. La nuit est tombée. Ces 3 vieux soldats l’ignorent mais ce combat entre termites sera inoubliable.
Mais pas pour de bonnes raisons…
En face d’eux, la chair à canon rentre en action.
Avancent les ravageurs de charpente, les sauvages du sorgho, les terreurs de la canne à sucre, les esclavagistes de champignons. Des macrotermitidés, autrement dit des termites d’élite.
Sur le champ de bataille :
- René aiguise ses mandibules
- Anselme lisse ses antennes
- Eugène bombe son abdomen.
En bandoulière, leur profond sentiment d’appartenance à la communauté des grignoteurs d’écorce.
Soudain, les macrotermitidés se ruent sur les grignoteurs d’écorce dans une cohue invraisemblable.
L’enjeu est de taille : le bosquet de la souche pourrie. Emplacement de rêve riche en magnolias et surtout en érables. Celui qui n’a jamais dévoré de l’intérieur un érable ne peut pas comprendre.
L’improbable champ de bataille
On divague et on vient de rater le début du combat. Avez-vous déjà assisté à une bataille de termites ?
Nous jamais, mais nous ne nous attendions pas trop à cela…
D’ailleurs, si vous êtes accro aux catastrophes improbables, prenez la direction du cratère de chicxulub, théâtre tragique de la disparition des dinosaures.
Les termites : des insectes pas comme les autres…
Voici qu’un termite vient de perdre une mandibule et crie « Mon dentier, mon dentier », dentier qui vient mordre Anselme à la patte.
Anselme incontinent lâche une salve sur René.
René ne sait plus pourquoi il est là et fait demi-tour.
L’arthrite d’Eugène l’empêche d’avancer et de combattre un sauvage du sorgho, sauvage qui de toute façon avait fait d’une brindille, sa septième patte.
Un autre termite, presbyte, doit s’éloigner de son ennemi pour l’identifier.
Sûr de sa cible, il s’en rapproche. Mais sa presbytie le fait douter : est-ce vraiment un ennemi ? Alors il s’éloigne, et de nouveau se rapproche de l’adversaire mais… et ainsi de suite.
Sa cible, justement, c’est Anselme, qui n’a toujours pas réussi à se défaire du dentier.
Un vrai champ de bataille !
Le commandant des ravageurs de charpente constate la désorganisation de ses soldats. Il lance un signal olfactif sur le champ de bataille :
« Contournez la termitière pour les prendre à revers ! »
Message collectif ? Pas vraiment.
Dans le brouhaha, un mot en remplace vite un autre. Et puis, les antennes n’étaient plus de prime jeunesse…
On comprend :
« Tournez la termitière pour les pendre à l’envers »
« Contournez la terre entière pour pondre des vers »
« Qu’est-ce que j’ai bien pu faire de ma tabatière ? »
D’incompréhensions en maladresses, de lumbagos en siestes soudaines, la bataille se termine pour les termites soldats.
On dénombre quelques fractures du col du fémur, d’autant plus sérieuses que les termites n’en possèdent pas, et un dentier qui court toujours.
Termites : Quand les vieux soldats deviennent de la chair à canon
Pourquoi ce récit d’une bataille qui aurait mérité de ne jamais être racontée ?
Et bien, comme expliqué dans Biology Letter (en anglais) et dans Sciences et Avenir, lors d’une attaque, les soldats termites les plus âgés se placent aux postes les plus dangereux.
C’est une clé de l’organisation de certaines colonies de termites. Les termites sont des insectes vraiment sociaux !
Chez l’homme, la chair à canon est jeune et fraîche.
Chez les termites, la chair à canon est faisandée. C’est le rôle des vieux soldats.
Envoyer au massacre les jeunes individus de la colonie, pour un termite, est inconcevable. Cette « solidarité » est à l’opposé de la cruauté de la mangouste rayée.
Comme dit un proverbe de termites :
« Qui veut préserver sa colonie protège sa jeunesse. »
Enfin notons que les batailles entre termites sont rarissimes.
Les termites ont déjà suffisamment à faire avec les fourmis, les pangolins, les chimpanzés, les fourmiliers, les tatous, les oiseaux, les lézards, les amphibiens, les chauves-souris ou les araignées. Autres champs de batailles, autres mœurs.
Êtes-vous prêt à envoyer vos grands-parents sur le champ de bataille ? À vous de nous le dire dans les commentaires !
Vous aimez les empires ? Découvrez les secrets du nid de frelons asiatiques avec l’interview décoiffante d’un frelon :
- Reine soumise
- Architecture du nid
- Mode chez les frelons (oui, oui, à votre avis, pourquoi ont-ils choisi le jaune et le noir ?)
- Perspectives de développement
Les frelons, racontés comme jamais.
Terrifiant ! Je ne vais certainement pas pouvoir dormir cette nuit !!!????????????
Chantal, cette scène de bataille est en effet terrifiante ! J’espère que la nuit a été bonne malgré tout ????. Si les termites se mettent même à ronger nos rêves…
L’actualité inquiétante qui nous occupe aujourd’hui m’ayant classé parmi les plus anciens, je pourrais donc me prénommer Anselme, René ou Eugène, comme ces vieux grognards de termites.
Je ne puis en conséquence répondre à votre question de savoir si j’enverrais volontiers mes grands-parents en première ligne… et ça m’arrange bien.
Nos trois vieux briscards qui en ont sûrement vu d’autres, ayant survécu, j’attends qu’ils reviennent à la une de Bestiapolitan pour d’autres aventures.
Merci Jean pour ce témoignage. On peut en effet penser que Anselme, Jean et Eugène en ont vu d’autres. La question de ce sacrifice en effet bien délicate, autant pour vous que pour de jeunes loups.
Nos 3 termites ont entendu votre appel et reviendront peut-être pour d’autres péripéties tout aussi saisissantes !
La légende voulut que même Mickael Bay refusa l’adaptation au cinéma, horrifié qu’il fut par l’extrême violence des combats.
Bestiapolitan ne se rappelle pas avoir été témoin d’une telle violence depuis le film d’animation Minuscule. Ce n’est pas peu dire.
J’attends le prochain billet pour lire la suite !
Nos termites ont du succès ! A bientôt dans de prochaines aventures !
Ouf! René, Anselme et Eugène s’en sont sortis alors. En tout cas, j’aime bien l’idée de pousser mémée en première ligne. Y’a pas à dire, ils sont forts ces termites (eh oui, j’ai vérifié le genre) et je recommande ce petit article si je peux avant que le bestiapolitan s’en mêle : https://www.franceinter.fr/emissions/l-edito-carre/l-edito-carre-04-decembre-2018
Merci PA et tu es un peu devin car Bestiapolitan prépare un article sur les talents d’architecte des termites. Le chef d’oeuvre des termites au Brésil (évoqué dans le billet de France Inter) est grandiose. A venir d’autres révélations inimaginables !
Quelle action, quel combat, quel suspense! Mais comment vont René, Anselme et Eugène depuis cette bataille?
Nous aussi, nous avons été saisis par l’intensité de la bataille. René, Anselme et Eugène te passent le bonjour. Ils envisagent de revenir à l’affiche d’un prochain billet. Nous sommes en pourparlers !